News - 02.01.2014

M. Badinter est pour l'abolition de la peine de mort… mais pas partout dans le monde!

Le 18 décembre 2013, les personnes qui assistaient à la conférence sur l’abolition de la peine de mort à la faculté de droit de Tunis II ont été les témoins d’une scène surréaliste voire kafkaïenne. Interrogé sur la situation des droits de l’homme en Palestine par une journaliste de «La Presse de Tunisie», M. Robert Badinter - le speaker vedette de cette manifestation - a refusé de répondre. Pire, non content de refuser de répondre, il  a passé au doyen Fadhel Moussa cette patate trop chaude pour lui. Et ce dernier de  s’exécuter derechef!

M. Badinter est assurément un «grand homme», «une icône»,  un phénix … qui fascine certains de nos intellectuels. N’a-t-il pas visité notre pays à plusieurs reprises depuis la Révolution? M. Badinter a fait voter l’abolition de  la peine de mort en France… sous la houlette du Président François Mitterrand.  Ce dernier  avait peut-être des remords… ou bien plutôt de sombres et machiavéliques calculs politiques à la florentine. D’après l’historien Benjamin Stora, François Mitterrand, quand il a quitté le ministère de la justice à la fin du mois de mai 1957, 45 condamnés à mort algériens avaient été guillotinés en 16 mois. La Guerre de Libération de ce pays frère battait alors son plein et les socialistes Guy Mollet et Robert Lacoste étaient alors les chefs d’orchestre de la sanglante répression.

Pour M. Badinter, l’antisionisme est une forme déguisée de l’antisémitisme. Il l’a toujours clamé. Il suffit de lire l’article d’Amnon Rubinstein dans le journal israélien Ha’aretz du 26 novembre 2003 pour le vérifier.

Critiquer Israël, c’est donc faire preuve d’antisémitisme. Voilà pourquoi l’ancien sénateur socialiste M. Badinter reste  bouche cousue à Tunis quand il s’agit des droits des Palestiniens.

M. Badinter a été le lauréat 2008 du Prix Scopus décerné par l’Université Hébraïque de Jérusalem pour ses hautes qualités humaines. Il est vrai que notre homme a une conception de l’amitié bien à lui : on se souvient de sa défense acharnée de Dominique Strauss-Kahn dans l’affaire du Sofitel de New York lors d’un débat télévisé avec Laurent Joffrin, du Nouvel Observateur… Lors de cet échange,  « l’icône » des droits de l’homme n’a pas eu un mot pour la victime et défendu bec et ongles son ami DSK. M. Badinter applique l’indigne  principe : « Prends la défense de ton frère, fut-il lui-même  injuste ou fut-il  victime d’une injustice.».

En fait, M. Badinter a une vision schizophrène des droits de l’homme… valables ici, inapplicables ailleurs ! Il pèse vos  questions sur un trébuchet à lui, à bras bien inégaux et use de poids estampillés antisémitisme et antisionisme avant de se prononcer. L’oracle ne s’est pas prononcé à Tunis. Trop de turbulence en vue. Le trébuchet s’est détraqué. M. Badinter s’est réfugié dans  le silence. Courage! Fuyons !

Deux poids, deux mesures.

Voilà l’éthique de ce «grand homme» devant lequel certains de nos penseurs tombent à genoux!
M. Badinter  parcourt le monde en grande pompe rendant visite à des chefs d’Etat pour les morigéner sur la situation des droits humains dans leur pays et pour inspecter des prisons où sont détenus des mineurs.   Jamais, au grand jamais, il ne s’est inquiété des conditions de détention des  enfants palestiniens qui croupissent dans les geôles israéliennes et auxquels les Israéliens font subir des supplices moyenâgeux : yeux bandés, pieds entravés, privés de sommeil.

Pire. Il n’a jamais élevé la voix pour condamner la peine de mort qu’inflige Israël aux Palestiniens… sans juges et sans défense. Sans la moindre once d’humanité fauchant femme- même enceinte-, enfant et vieillard. Depuis juillet 2013 – début des négociations israélo-palestiniennes - 31 Palestiniens ont été assassinés par l’armée israélienne ou des colons sionistes. En Cisjordanie, d’après l’organisation israélienne B’Tselem, 27 Palestiniens ont été assassinés en 2013  par l’armée d’occupation, trois fois plus qu’en 2012. Un exemple de ces lâches assassinats est rapporté  par Jessica Purkiss dans le Middle East Monitor: le 7 décembre 2013, Wajih Wajdi Al Ramahi, tué à 14 ans d’une balle dans le dos alors qu’il était près de son école, dans le camp de réfugiés d’Al Jalazoun, près de Ramallah.  L’établissement scolaire étant proche de la colonie Bet Al, une tour de garde de l’armée le surplombe et la présence des soldats crée une atmosphère de tension permanente dans les parages. En mai 2013 déjà, Atta Sabah âgé de 12 ans,  élève de cette école, a été atteint par la balle tirée par un soldat qui fouillait son cartable. La  balle lui  a perforé l’estomac en rentrant et sectionné  la moelle épinière en sortant par le dos : le  gamin est maintenant un  paralytique ayant perdu l’usage de ses membres inférieurs.

Dans un livre intitulé «Le livre noir de l’Occupation israélienne. Les soldats racontent» paru en 2013 à Paris aux éditions Autrement, des éléments de l’armée israélienne racontent les horreurs commises dans les territoires occupés. Ils confessent et témoignent pour soulager leur conscience. Avec retard! L’un d’eux donne les détails d’un drame qui a eu pour cadre Naplouse en 2002: «On a investi une maison du centre-ville… un tireur d’élite a repéré un homme sur un toit, deux maisons plus loin, sans arme. J’ai regardé l’homme dans la vision nocturne: il n’était pas armé. Il était deux heures du matin. Un homme sans arme qui marchait sur le toit, il se promenait. On l’a signalé au commandant. Il a dit: «Descendez-le». Le tireur d’élite a tiré. Il l’a descendu… En gros le commandant a décidé et ordonné par radio la peine de mort pour cet homme. Un homme désarmé… Un type de 26 ans, mon commandant de compagnie, a condamné un homme désarmé à mort… Ce qui est illégal à mon avis et nous, on a exécuté l’ordre, on l’a tué. L’homme est mort. Ecoutez, pour moi, c’est un meurtre. Et ce n’est pas le seul cas. On en rigolait, on avait des noms de code [pour les personnes abattues]: «le guet»,  «le batteur», «la femme », «le vieux», «le garçon»… (Pages 34-35)

M. Badinter, il s’agit là d’exécutions extra-judiciaires condamnées par toutes les législations du monde. Par toutes les morales. Le grand rabbin d’Angleterre a condamné cette barbarie. Vous, on ne vous a jamais entendu sur ces meurtres. Les droits de l’homme sont indivisibles : vous les avez récemment défendus devant le Président albanais. Pourquoi ne pas joindre votre voix pour arrêter tous ces  crimes commis par Israël, tel  celui de Wajih Wajdi,  tué à quatorze ans, mon dieu ! Il pourrait être votre petit-fils!

Alors, souffrez Monsieur, que l’on ne vous prenne pas au sérieux et de grâce, évitez-nous, à l’avenir, ici, en Tunisie, vos hautaines exhibitions et votre morgue.

Mohamed Ettounsi

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Tags : Fadhel Moussa   Fran   Palestine   Tunisie  
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9 Commentaires
Les Commentaires
Takfarinas - 03-01-2014 03:55

Plus fort que nous, Tunisiens ? Tu meurs ! J'espère que le nom de l'auteur n'est pas un pseudo ! Voilà maintenant qu'on cherche noise même à nos amis, ceux qui nous soutiennent en ce moment difficile, à l'instar de M. Badinter. Qu'est ce que ça peut nous f... si Badinter est pro-israélien ou pro DSK ? Bourguiba parlait du Mouhimm et du Ahamm ! El Ahamm c'est qu'il est pro-tunisien ! Le jour où nous apprendrons à faire la part des choses, nous serons des vrais citoyens d'une vraie NATION, Monsieur ETTOUNSI ! J'espère tout de même que vous ne faites pas partie de ceux qui veulent inscrire la "normalisation" (ettatbi3 !!!) avec Israël dans la nouvelle Constitution !

negib laroussi - 03-01-2014 07:35

pour avoir connu M. Badinter, quand on était tous les deux membres du comité central de la ligue française de défense des droits de l'homme, je confirme ce qui est dans l'article de M. Med ettounssi.no comment

citoyenne indépendante - 03-01-2014 10:01

Je comprends que l'abolition de la peine de mort ne sera jamais autorisée par une bonne partie du monde .l'Amérique qui est la civilisation la plus puissante continue son application. Chaque cas reste un cas particulier,et la mort une délivrance!

AMBO - 03-01-2014 10:33

Certains ont clamé : ne touches pas à mon pote et d'autres ne touches pas à Israel . Je respecte nos frères juifs mais un peu d'honneteté de leur part serait bien apprécié . On n' a jamais été responsable de leurs malheurs : ce sont les Européens qui les ont le plus persécuté . Un jour peut-etre ......

Observateur - 03-01-2014 13:11

Les positions de M. Batinder sont pourtant bien connues. Pourquoi l'a-t-on invité? C'est vrai que pour certains la vérité vient de la France. Une petite remarque : M. Tounsi nous cite un « indigne principe ». Faisait-il allusion au Hadith qui dit : « Soutiens ton frère, qu'il soit juste ou injuste. »? Parce que la suite du Hadith est loin de le rendre « indigne ». Voici la suite : « Un homme demanda : ` Ô Messager de Dieu ! Je peux l'aider s'il est juste mais comment puis-je l'aider s'il est injuste ?` Il répondit : `Empêche-le de commettre l'injustice, c'est ainsi que s'exprimera ton aide à son égard ` ».

Megdiche - 03-01-2014 13:57

Bravo cher ami Mohamed pour votre article. Que ts ceux qui sont épris de liberté, de dignité et de respect pour l'être humain demandent à Mr le batonnier célèbre Badinter, ainsi qu'à sa femme féministe et écrivaine d'avoir le courage de ceux qu'on appelle les justes pour condamner les agissements inhumains du pouvoir israélien sur les palestiniens.

Hela Snoussi - 03-01-2014 18:34

A Takfarinas La nation tunisienne n'a pas attendu M. Badinter Français né en Bessarabie pour se former. Il y a eu Carthage et la lex romanae, Okba, les Aghlabites, Khéreddine, Moncef Bey et Bourguiba. Si Badinter est pro-israélein, il ne peut être notre amie. Vous oublier le bombardement de Hammam Chott et les incursions du Mossad chez nous pour assassiner! S'il est pro-israélien, Badinter n'est pas bienvenu chez nous. Israél est un Etat-voyou. Il a bombardé l'Irak, la Syrie...Et n'oubliez pas ce que dit un philosophe français (Montesquieu ou Rousseau? je ne sais plus): "Une injustice faite à un seul est une menace faite à tous"". Si tu laisses faire Israél avec les Palestiniens, comment le condamner quand il le fera chez nous? Pour finir, la Tunisie étant membre de la Ligue Arabe, de facto, nous sommes en guerre contre Israél et de toute façon, nous ne le reconnaissons pas comme Etat (pas d'ambassadeur). Souvenez-vous comment les Tunisiens ont refusé la venue de Sharon pour le Sommet de l'info du temps de Ben Ali. Alors, lisez bien ce texte solide (merci à LEADERS)avant de vous agenouiller devant Badinter et ayez un peu d'humanité pour les souffrances des Palestiniens.

Observateur - 03-01-2014 19:50

Pourtant les positions de M. Batinder sont bien connues. Pourquoi l'a-t-on invité? C'est vrai que pour certains la vérité vient de la France. Une petite remarque : M. Tounsi nous cite un « indigne principe ». Faisait-il allusion au Hadith qui dit : « Soutiens ton frère, qu'il soit juste ou injuste. »? Parce que la suite du Hadith est loin de le rendre « indigne ». Voici la suite : « Un homme demanda : ` Ô Messager de Dieu ! Je peux l'aider s'il est juste mais comment puis-je l'aider s'il est injuste ? » Il répondit : « Empêche-le de commettre l'injustice, c'est ainsi que s'exprimera ton aide à son égard ` ».

non communautariste - 03-01-2014 19:54

Excellent article. A quand un article sur Elie Wiesel "prix nobel de la paix" !!!!!!

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