Moncef Kechaou: La dure mission qui l’attend à la tête de la Cour de cassation
La Cour de cassation de Tunis retrouve enfin sa sérénité. La nomination de Moncef Kechaou à sa tête met fin à une léthargie de plus de deux années. L’ancien titulaire de la plus haute charge de la magistrature en Tunisie, Taïeb Rached, avait en effet fait l’objet depuis le mois d’août 2019 de plusieurs faisceaux de suspicions. Il était accablé par son rival, le procureur de la République près le tribunal de première instance de Tunis, Béchir Akremi. Les accusations réciproques entre les deux hauts magistrats et deux rapports de l’Inspection générale du ministère de la Justice ont conduit le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) à prononcer leur limogeage, tous les deux, et décider leur traduction devant le parquet au cours de l’été dernier.
La Cour de cassation était quasiment à l’arrêt depuis l’éclatement de l’affaire, les chambres réunies ne pouvant en effet délibérer.
Redonner à la Cour son rayonnement et unifier les positions
Le choix de Moncef Kechaou, élu par le CSM et entériné par le président de la République, a été bien accueilli. «Cette nomination suscite un grand espoir, déclare à Leaders Youssef Bouzakher, président du CSM. C’est un haut magistrat reconnu pour sa compétence et très respecté. Il prend ses fonctions dans des circonstances difficiles, mais nous sommes tous confiants qu’il saura redonner à la justice judiciaire tout son rayonnement. Sa première mission est de réactiver les chambres réunies qui jouent un rôle essentiel dans la réunification des positions dans des affaires importantes, notamment celles qui suscitent un grand intérêt auprès de l’opinion publique, à l’instar de celles relatives à la malversation.»
A présent, pas moins de 120 dossiers sont en cours d’examen devant les chambres réunies. Afin de rattraper le retard accumulé, le premier président de la Cour de cassation envisage de tenir des séances hebdomadaires pour les traiter.
Une tâche des plus difficiles
«Moncef Kechaou incarne une brillante carrière de magistrat compétent, droit et intègre, déclare à Leaders un juge aujourd’hui retraité qui l’a bien connu. Ce n’est pas la première fois qu’il a postulé à cette charge après 2011. Mais sans aucune raison valable, il avait été écarté par ceux qui ne voulaient ni de son indépendance, ni de sa rigueur. Quel dommage ! La justice aurait pu gagner des années précieuses, malheureusement perdues.»
A 59 ans, Moncef Kechaou aligne 37 ans de carrière judiciaire. Depuis 2011, il était président de chambre à la Cour de cassation. Né à Sfax en 1961, il avait intégré le ministère de la Justice en 1984, gravissant les grades un à un, et exerçant dans différents tribunaux de Tunisie. Enseignant universitaire de droit civil et de droit commercial, il est également l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés de référence.
Moncef Kechaou a entamé sa carrière au tribunal de première instance de Sidi Bouzid, puis a été nommé juge cantonal à El Hamma, puis à Agareb. Il fut tour à tour notamment président du tribunal de première instance de Sfax et président de la Cour d’appel de Médenine avant de rejoindre la Cour de cassation en tant que conseiller, puis président de chambre et, à présent, premier président. Sa tâche sera dure, mais il y réussira.
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