Opinions - 15.04.2011

Nos amis les grévistes

Ils font la une des journaux, envahissent nos écrans et poussent la chansonnette des revendications là où pend un micro. Ils crient au lieu de parler, ont l’insulte facile et ce tic de se déplacer en meute et d’empêcher toute activité productive. Ils ne sont généralement pas contents et le font savoir à tout le monde. Ils veulent se faire prier et trouvent un malin plaisir à rejeter tout ce qu’on leur propose. Leurs attroupements suscitent la curiosité et ils en sont flattés et leurs manifestations tournent souvent au vinaigre et attisent les violences. Ils finissent par exaspérer les gens et ils s’en foutent. Vous avez certainement reconnu nos amis les grévistes, ces fervents militants du blocage et du chaos.

Ces pirates de la révolution saisissent tout fléchissement ou reculade du gouvernement pour nous acculer davantage et satisfaire allègrement leur appétit grandissant. Ils sont partout et sur tous les fronts?: ils bloquent les routes, les autoroutes, sabotent le trafic ferroviaire, paralysent les routes maritimes, brûlent les usines, agressent les cadres, terrorisent les gens. Ils menacent par leurs sit-ins et refus de travail notre hygiène, notre santé et notre sécurité. Par ce climat délétère qu’ils nous font subir, ils condamnent notre économie et minent notre avenir.

Tout et tout de suite, c’est ce qu’ils veulent. Plus d’impôts, augmenter les salaires, fermer des usines polluantes, embaucher les riverains de certaines unités de production…Dans la Tunisie nouvelle, la vanne aux revendications est desserrée au maximum et le débit des surenchères est à son paroxysme.

Ils ont en plus la malice de nous servir ça avec une sauce patriotique en sucrant leurs revendications narcissiques par quelques zestes révolutionnaires. Ainsi, croient-ils, qu'en demandant la tête de quelques supposés cadres corrompus, ils puissent faire passer la pilule plus facilement. Ou étaient ces Robespierre et Cromwell des temps modernes avant la révolution ? On a eu beau prêter l’oreille, on ne les entendait pas ? C’est maintenant qu’ils veulent purger leurs administrations ? Pour être pris pour des idiots pendant des années durant et avec beaucoup plus d’habileté que ça, je ne vois pas qui peuvent-ils encore berner avec ces histoires à deux sous ? Ils revendiqueraient leur cupidité tout haut, on respecterait au moins l’honnêteté de la démarche.

On n’évite jamais une guerre, on ne fait que la différer. Je crois que le gouvernement a suffisamment vacillé et assez fait de concessions comme ça. Il n’est pas arrivé à persuader les uns ni à dissuader les autres. Par sa magnanimité il a alléché les plus gourmands et par sa clémence a laissé percevoir des signes de faiblesse. L’assaut d’avidité n’en fut que décuplé.

C’est pour cela que notre gouvernement doit changer de méthode, doit changer de discours. Il doit se hisser au niveau de l’action et ne pas sombrer complètement dans les vicissitudes du verbe. Accepter la fatalité de l’affrontement et crever les abcès une fois pour toute. Arrêter de discuter, de discutailler, de débattre, de convaincre, de dialoguer, de caresser au sens du poil et je ne sais quel autre procédé de résignation et de pourrissement. Le pays est en train de morfler et notre richesse, ou ce qu’il en reste, est en train de tarir à petit feu et on trouve encore l’excuse pour ne pas bouger. Il faut agir vite et fort.

L’Etat a le monopole du recours à la violence. C’est la base du contrat social qui ligue toute société. Si certains se croient au dessus de ce consensus originel, alors tous ont des raisons de le croire aussi. Et si nous nous plaçons au dessus de l’Etat, ce dernier cesse d’exister.

Autre chose, l’illégalité de ces protestations ajouté à l’impunité des protestataires pilonne un autre fondement de la république. Ces gens se placent au dessus de la loi. Et s’ils s’en sortent gratifiés en plus, comment peut-on prêcher l’égalité devant la loi auprès des autres citoyens et comment les contraindre à la respecter si d’autres gagnent en la bafouant.

Je ne prône pas le retour à l’Etat de terreur mais j’en appelle à l’Etat de droit. Nous mesurons tous les dérives qui peuvent découler du recours à la violence par les services d’ordre, mais vu l’ampleur des protestations et la gravité de certains agissements, je crains que l’opinion publique ne soit arrivé à un point de dépit où elle serait prête à accepter ces dérives, je dirais même de les accueillir avec joie. La route serait alors toute tracée pour une nouvelle dictature. Balzac laissait dire à l'un de ses personnage, et à juste titre d'ailleurs, que "la liberté enfante l'anarchie, l'anarchie conduit au despotisme et le despotisme ramène la liberté"

Je n’ai pas de mots pour qualifier ces….voilà je n’ai pas de mots. Ils ne sont pas plus patriotes que ne l’étaient l’ancien président et sa cour. Les deux sont mus par un égoïsme exaspérant, un appétit insatiable et un opportunisme à toute épreuve. Par leurs grèves sauvages, ils desservent tous le monde et remettent en cause tout le processus démocratique. Ils ternissent l’image de la Tunisie et sabotent son essor. Ils sont en train de se flinguer …et ils ne le savent même pas.

«?Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous. Demandez ce que vous pouvez faire pour votre pays?».  John Fitzgerald Kennedy

Zied Boumaiza
*Magistrat à la Cour des Comptes

 

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15 Commentaires
Les Commentaires
laabed - 15-04-2011 18:18

ces grévistes ne peuvent pas être nos amis,et l'opinion publique ne peut accepter indéfiniment leurs agissements.la cocotte minute populaire selon l'expression de Béji Kaid Sibssi est de nouveau en ébullition et elle peut éclater à leur visage à n'importe quel instant.

najiba - 15-04-2011 20:22

Je ne peut dire que BRAVO

Sonia - 15-04-2011 20:53

BIEN DIT METRE BOUMAIZA en plus ceux qui veulent travailler subissent leurs sarcasmes et on est mal vu si on applique les réglementations en vigueurs dans les administrations donc on essaie d'affronter et surtout de patienter je croix qu'il ne faut surtout pas laisser sa place de travailleur et combattre en étant patient ça se tassera surement un jour j'aimerais bien les voire ce jour la

Mnif najib - 15-04-2011 23:07

Encore une fois , vous dénoncez justement les détracteurs de notre liberté , a laquelle tous les tunisiens aspirent , je me joins a vous pour lancer un CRI a notre gouvernement pour dresser des objectifs limites a ne pas dépasser tel que :intervenir avec force contre les blocages de route , fermer les entrées de certaines unités industrielles par des étrangers a l,entreprise , c,est le minimum admissible dans l'immédiat

gaha chiha - 16-04-2011 08:02

Je trouve votre violence un peu excessive même si je comprends tout à fait votre exaspération. Avec les nombreux débordements que nous connaissons et auxquels vous faites allusion, la Tunisie connaît, aujourd'hui, en effet, une grave crise. Le gouvernement provisoire est fragile, les intellectuels se taisent et les partis politique et surtout l'UGTT font des (faux) calculs... Merci Si Zied d'avoir dit et rappelé crument certaines vérités.

LiliaZkm - 16-04-2011 13:48

Vous avez exprimé tout à fait ce que je pense moi et mon entourage. C malheureux! On veut bien être patient et compréhensif et se dire que C normal en post révolution, que ça a toujours été le cas partout. Mais il y a une limite et je sens qu'elle est déja largement dépassée, il faut que ça s'arrête et seul le gouvernement peut le faire, il faut sévir et cesser d'être "un gouvernement gateau" pour mendier l'approvation.

Abdelhamid Mouelhi - 16-04-2011 15:30

Merci Maître. Tout est dit et de quelle façon. Toutefois, je voudrais joindre ma voix à celle de M. Gaha pour souligner le rôle oh combien négatif de l'UGTT dans cette étape sensible de notre histoire. Est-elle occupée à donner des leçons au Gouvernement : dissoudre ceci faire cela, sans oublier de presser ledit Gouvernement pour entamer les négociations salariales et va jusqu'à demander une avance sur les augmentations futures. Un comble !!!

BAHRI - 16-04-2011 18:32

MONSIEUR BOUMAIZA, JE PARTAGE ENTIÈREMENT VOTRE AVIS! LES TUNISIENS DOIVENTE ÊTRE FIDÉLES Á LEUR TRADITION; DONC Á LA FLAMME DE LA RÉVOLUTION ET NON À LA CENDRE. POUR REPRENDRE JEAN JAURÈS: "QUAND LES HOMMES NE PEUVENT CHANGER LES CHOSES, ILS CHANGENT LES MOTS." VIVE LA TUNISIE LIBRE ET INDÉPENDANTE, OUI À LA DÉMOCRATIE, OUI À L'ÉTAT DE DROIT, OUI À LA JUSTICE INDÈPENDANTE, NON À L'ANARCHIE, NON À LA VIOLENCE!

Meriem - 17-04-2011 05:26

Je suis entièrement d'accord!!! J'y ajouterai juste, comme gaha chiha, que l'UGTT est sûrement mêlée à ce désordre ambiant et elle y est pour bcp!!!!!!!!!!!!!!

imene - 17-04-2011 11:04

j'ai de la peine pour la tunisie. la situation s'aggrave et si le gouvernement ne réagit pas à l'immédiat et ne prend pas les mesures nécessaires, on sera vraiment dans le pétrin! le gouvernement doit arrêter de céder! à chaque fois où il se plie pour les demandes d'un groupe, un autre surgit. c normal puisque la grève donne ses fruit ..! alors stop, je partage l'idée que maintenant il faut être plus sévère et arrêter les concessions. je souhaite que quelqu'un du gouvernement explique la situation grave de la tunisie et qu'il explique clairement que c à cause des grêves; qu'il essaie aussi de toucher l'affect du tunisien en disant que la tunisie est entre ses mains, que les grévistes tuent la tunisie, que celle-ci doit passer avant tout etc.. bref, on a besoin d'une communication touchante et plus forte que l'UGTT et en même temps d'une force sans dépasser les limites. le tunisien aime son pays mais par ignorance, il est aveuglé par les promesses viscieuses de l'ugtt. MERCI ZIED. j'adore tout ce que tu as écrit, mot par mot, lettre par lettre.. l'excellence même de la forme et du fond. BRAVO et surtout continue.

fouad - 17-04-2011 17:01

Il faut les comprendres les pauvres, on leur demande de payer des impôts, en période de révolution, c'est pas normal ! . C'est comme de demander a des enfants de rèster sages quand les parents sorte faire les courses.

Miss - 17-04-2011 22:48

Bravo Zied, tu as mis des mots sur le malaise du tunisien d'aujourd'hui et tu as dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas car à l'époque de ZABA, on n'osait rien dire de peur d'être traité de terroriste et maintenant on n'ose rien dire de peur d'être traité d'anti-révolutionnaire!! A croire que la liberté de penser n'est finalement qu'une utopie en Tunisie où ne règne plus que le banditisme physique et intellectuel!!!

sana - 18-04-2011 11:05

ces gens profitent bien de la situation et le gouvernement ne sait plus ou donner de la tête ! on voit des ministres hyper actifs qui essayent des trouver des solutions à plusieurs problémes dont la liste n'en finit pas!!! pourquoi ne pas réclamer ses droits en mettant une bande rouge au bras par exemple tout en TRAVAILLANT! que dieu bénisse notre Tunisie.

BEN HASSINE - Paris - 19-04-2011 18:01

il s'agit là d'une attitude suicidaire pour la compétitivité du pays , peut être nos grévistes ne savent pas que le SMIC Tunisien est à hauteur du SMIC Roumain , on peut toujours mieux faire dans le social mais à condition de rester compétitif pour attirer les investisseurs , augmenter délibérement les salaires de façon déraisonnée sans augmenter la productivité est une politique d'échec à trés court terme

Latif Ben Amara - Munich/Allemagne - 22-04-2011 22:57

YEUX BRAQUÉS SUR NOUS ! Un COUP DE CHAPEAU a mes compatriotes Tunisiens, le peuple Tunisien d´avoir provoquer le changement dans notre pays !... On ne peut pas hélas prétendre que cet acte est suffisant; le grand travail difficile reste a faire. Le monde entier a les yeux grands ouverts et braqués sur nous les Tunisiens et sur l´évolution du pays. Pour eviter que cela tourne a la dérision et afin de donner un sens a cette révolution, il est grand temps que la majorité des Tunisiens saisissent l´ampleur de ce mouvement et l´importance de l´enjeux. Cet etat de choses doit "obligatoirement et sans compromis" naitre et énèrgiquement dans l´esprit des citoyens, allant du PDG d´entreprise, en passant par le fonctionnaire, l´agent de police, le maitre d´école etc... jusqu´au chomeur ! Il doit exister un elan général de la population une sorte de "Nationalisme" que chacun participe a sa manière et contribue au bon fonctionnement de l´économie et a la sécurité du pays. Faute de quoi (comme déja dit) cette révolution tournera a la dérision au yeux des pays étrangers qui nous observent. Ce n´est pas en faisant des grèves que nous allons dynamiser l´économie, nie des complaintes a tout bou de champs que des emplois vont etre crées ! Ce serait une erreure fatale de nous comparer avec les pays européens. Ceux-ci obligent leurs citoyens de se lever trés tot le matin pour aller au travail, et attendent d´eux un certain rendement et engagement ... Prenons SVP le bon exemple des autres pays et tentons de mettre en application cet etat d´esprit dans le notre !!! Ainsi les autres pays qui nous observent voudrons non-pas tirer un "coup de chapeau" mais plutot un GRAND COUP DE CHAPEAU pour lnotre CHÈRE TUNISIE a laquelle je suis trés fier !... Latif Ben Amara - Munich/Allemagne

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