Pourquoi ne pas encourager l'émigration de nos compétences ?
En Tunisie comme dans les autres pays du Maghreb, la première semaine de septembre est marquée par le retour des émigrés dans leur pays d'accueil. Déjà, dès la fin aout, les voitures portant des des immatriculations étrangères se font de plus en plus rares dans nos rues. Ils sont des centaines de milliers à faire chaque année la traversée de la méditerranée à bord des navires de la CTN, pour la plupart, dans leurs voitures-cathédrales, surchargées de bagages, pour venir se ressourcer pendant un mois dans leur pays natal avant de prendre le chemin du retour et s'être " délestés " de leurs encombrants bagages offerts à leurs proches ou vendus dans les souks hebdomadaires.
A la sixième session des Journées Cinématographiques de Carthage qui s'était tenue à l'automne 1976, c'est le film tunisien, " Les Ambassadeurs ", réalisé par un jeune cinéaste alors inconnu du grand public, Naceur Ktari, qui avait décroché le Tanit d'or du meilleur film. Les ambassadeurs, c'était les émigrés tunisiens en France qui " se devaient d'avoir un comportement exemplaire dans leur pays d'accueil et être les dignes représentants de la Tunisie à l'étranger ", comme on les présentait alors dans les discours officiels. Depuis la nuit des temps, notre pays a été une terre d'immigration. Avec la crise sociale des années 60 liée à la collectivisation, les Tunisiens ont commencé à émigrer d'abord en France pour des raisons historiques évidentes puis dans les autres pays européens.
Le film avait eu le mérite de dessiller les yeux des Tunisiens sur la malvie de cette diaspora constituée pour l'essentiel d'ouvriers, des O.S ( ouvriers spécialisés ), comme on disait, en butte aux problèmes du chômage ( déjà! ), du racisme et de l'exclusion. Trente ans plus tard, les bidonvilles comme celui de Nanterre dans lesquels étaient parqués ces émigrés ont été rasés et le ventre est encore fécond d'où sont sorties ces bêtes immondes. Mais à la génération des pionniers, pour la plupart des analphabètes ont succédé une deuxième puis une troisième génération mieux instruites donc plus conscientes de leurs droits, mieux intégrées. Il n'est plus question de " retour au définitif ". Les pays d'accueil, même s'ils essaient de maintenir le cordon ombilical, de plus en plus ténu il est vrai, qui lie ces émigrés à leur terre natale ou à celle de leurs parents, ont fini par en prendre leur parti, se contentant d'en faire leur profit.
C'était la voie de la sagesse. Car les transferts de cette colonie forte d'un million de personnes répartis sur une trentaine de pays sont évalués à 1,9 milliard de dollars par an soit le cinquième du PIB tunisien. Une manne qui, outre le fait qu'elle fait vivre des milliers de familles dans notre pays contribue à l'équilibre de la balance des paiements.
Prendre exemple sur la Chine et l'Inde
Depuis quelques années, cette émigration a pris une autre forme. Elle touche de plus en plus les hauts cadres et d'une façon générale les diplômés du supérieur. Particulièrement recherchés par les "chasseurs de têtes" européens pour la haute qualité de leur formation et leur sérieux, on les trouve dans la plupart des secteurs à haute valeur ajoutée, notamment les plus pointus où ils semblent donner entièrement satisfaction à leur employeurs, alors que d'autres ont choisi de voler de leurs propres ailes en créant leurs propres entreprises. La plupart ne sont pas attirés par l'appât du gain mais cherchent à se réaliser dans des structures que notre pays n'est encore en mesure de leur offrir.
Beaucoup s'en inquiètent. Se sont-ils posé la question de savoir si le marché de l'emploi en Tunisie est en mesure d'absorber toute cette masse de diplômés qui sortent chaque année de nos universités? N'est-il pas temps de se débarrasser de ces clichés sur " l'exode des cerveaux ", " le pillage de la matière grise du tiers monde " qui datent des années 60? J'ai pris part dernièrement à un déjeûner-débat organisé par l'association des diplômés tunisiens des grandes écoles françaises ( ATUGE ) ser le thème " l'engagement citoyen ". L'assistance était constituée pour moitié d'expatriés. Le principal enseignement que j'ai tiré de ses discussions est que l'émigration de nos compétences peut être d'un grand apport pour notre économie.
On parle depuis trente ans de transfert de technologies que les investisseurs étrangers sont censés nous apporter sans rien voir venir. Pourquoi ne pas faire l'effort de faire venir nos compétences expatriées non pas pour s'y installer mais pour implanter des filiales des entreprises qu'elles ont créées à l'étranger. Beaucoup l'ont fait déjà et ne le regrettent pas. C'est ce qu'ils appellent l'engagement citoyen. Au lieu de jeter l'opprobre sur une catégorie de citoyens qui ne cherchent qu'à servir leur pays, faisons l'effort de les comprendre comme ce fut le cas avec nos émigrés dans les années 90 et faisons en notre profit. Car, ne l'oublions pas. C'est grâce à leurs compétences installées à l'étranger notamment aux Etats Unis et en Grande Bretagne que l'Inde et la Chine sont devenues de grandes puissances industrielles et acquis les technologies qui leur faisait défaut.
Hedi
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Non \"le pillage de la matière grise du tiers-monde\" ne relève pas d\'un concept des années 60. C\'est une réalité hélas du 21eme siècle. Les exemples que vous citez sur les quelques expatriés reflètent d\'autant moins la réalité que votre démonstration sur la manière dont l\'Inde et la Chine sont devenues des puissances industrielles est totalement fausse: leur puissance vient hélas de la sous-traitance à bas prix et de l\'emploi d\'ingénieurs et diplômés dans des entreprises locales sous-traitantes à des salaires supérieurs il est vrai aux salaires locaux, mais largement inférieurs à ceux pratiqués dans les entreprises occidentales donneuses d\'ordre. Et puis, non, les transferts d\'argent des Tunisiens de l\'extérieur vers le pays ne s\'élèvent pas à 1,9 million de dollars (somme dérisoire) et non, 1000 fois non, cela ne représente pas un cinquième du PIB tunisien, ce qui ferait et de loin dans ce cas le pays de plus pauvre de la planète
\"1,9 million de dollars par an soit le cinquième du PIB tunisien\" Parceque le PIB Tunisien c\'est 9,5 million de dinars? Un média se doit d\'être instruit pour ne pas divulguer l\'ignorance...
Une coquille s\'est glissée dans l\'article. Il faut lire 1,9 milliard de dollars et non 1,9 million de dollars. Nos lecteurs auront rectifié d\'eux-mêmes.
Tous les jeunes tunisiens ne rêvent que de ça: partir
Pour exporter des cerveaux comme il est preconise dans l\'article, il faut avoir atteint non selement la masse critique en cadres et autres technologues mais aussi etre certain que la qualite du produit de notre systeme educatif est d\'un niveau mondial. Malheureusement ce n\'est le cas. En effet aucune de nos universites ne rentre dans la classification mondiale des 500 voir les 1000 premieres universite [ l\'universite Saoudienne du roi Saud y figure commela premiere universite arabe, alors que deux institutions Turques figure dans le top 10].Il serait utile de voir le pourcentage des competences tunisiennes occupant un poste decisionel dans un pays etranger et qui ont suivit un curriculm 100% Tunisien. La Tunisie a besoin de toutes ses competences pour realiser son objectif de rejoindre le monde developpe. Encourager la fuite des competences,c\'est laisser le champ libre sue le plan national au nivellement par le bas et a l\'institution de la mediocrite. La Tunisie a fait beaucoup de chemin et doit tout faire pour garder ses competences aussi bien sur le plan social qu\'economique. Une idee erronee vehicule par l\'article consiste a croire que les competences Tunisiennes sont tres utiles au pays ne serait ce que parles rentrees de devises.Il est utile de noter que quand un cadre est embuauche par une sntreprise etrangere, il est entierement a son service et par consequent au service du pays ou il reside. L\'effort fournit par les cadres pour satisfaire leur employeur ne leur laisse pas le temps ou alors tres peu pour des activites professionelles \" patriotes\". Au mieux il vont essayer de promouvoir le \"know How\" Tunisien si et surtout il est competitif. L\'interet economique des vrais competences travaillant sur le territoire est sans commune mesure et depasse de loin l\'interet d\'un cadre travaillant dans un pays etranger. La mondialisation ne doit se faire sur le dos des besoins reels des pays emergents. La fuite des cerveaux comme on qualifie l\'immigration des competences reste d\'actualite au risque de deplaire a l\'auteur de l\'article. Faire des comparaisons avec l\'Inde et la Chine releve d\'un manque d\'informations sur la structure sociale(demographique), l\'histoire, le geo-politique et les cultures de ces pays.
Et il faut lire également 5% du PIB et non le 1/5 ;) Plusieurs pts important st évoqués ds l'article et les réactions: - Emigration des cadres : Plus que les devises, le plus important c’est le différentiel de connaissance et de savoir-faire qu’offre les pays destinataires (France, UK, US…). L’idée sous-jacente : Investir ds nos cadres actuels et futurs et leur permettre de saisir ce différentiel pr qu’ils soient les relais et vecteurs d’un vrai transfert de technologie et de savoir-faire. - Attractivité du site Tunisie : Il ne suffit pas d’envoyer des têtes bien faites à la quête de ce différentiel, il faut en récupérer un max sinon l’équation économique est aberrante. Cela ne devrait pas remettre en question le 1er pt (stratégie de l’autruche) mais nous encourager à penser cmnt attirer ces compétences tunisiennes (voire non-tunisiennes) pr qu’ils amènent leurs plus-value. L’article cite qques éléments de réponse : ces Atugéens qui « cherchent à se réaliser dans des structures que notre pays n'est encore en mesure de leur offrir » : quelles st ces structures ? Pkoi ne pouvons-nous pas les leur offrir ? Cmnt changer cela ? Ces structures devraient-elles êtres « offertes » ou devraient-ils les créer eux-même et bien sur il y a d’autres raisons à identifer :) - Le niveau de l’éducation en Tunisie : sujet préoccupant car son impact est profond et à long terme. Qu’en est-il? La qualité suit-elle la quantité ? Sinon, quelles en sont les raisons ? Cmnt faire pour y remédier ? Y a-t-il des benchmarks proches qui pourraient nous inspirer ? - L’insertion professionnelle : une partie du problème des diplômés du supérieur ne vient-elle pas de la quantité ? Le modèle de société où chacun est cadre est-il viable ? Ne devrions-nous pas valoriser davantage les filières professionnelles et artisanales (cf. modèle allemand) et les formations dédiées à l’entreprenariat Voilà qques éléments de réaction à cet article (merci à l’auteur) qui donneront des idées j’espère pr des articles plus élaborés et plus étayés :)